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Discussions

stades de récolte des régimes et qualité des fruits

L'amidon constitue 30 à 35 % de la matière fraîche de la pulpe du plantain avant sa maturation (KETIKU, 1973; MARRIOTT et al, 1983; COLLIN et DALNIC, 1991), soit 80 à 87 % de sa matière sèche, dont l'évolution de la teneur rend donc compte, en grande partie, de la variation du taux d'amidon.

Figure 3 - Évolution du rapport poids de pulpe/poids de peau de doigts de plantains récoltés à des stades de maturation différents exprimés en sommes thermiques.

Après le stade 1 000 °Cj, l'augmentation du poids des régimes ralentit et le taux de matière sèche dans les fruits diminue, traduisant une production d'amidon moins importante, suivie d'un début de maturation observé au stade 1 200 °Cj. La diminution des teneurs en matière sèche (pulpe et peau), malgré une croissance relativement faible du poids des régimes, serait attribuée, essentiellement, à une absorption d'eau, laquelle participe à l'augmentation de volume du grain d'amidon et à la modification de sa conformation (GNAKRY et KAMENAN, 1990).

Tableau I - Caractéristiques des bananiers plantains French sombre, en fonction du stade de récolte de régimes, mesuré à partir de la formule des sommes thermiques définie par GANRY (1978).

Somme thermique (°Cj)

800

900

1000

1100

1200

Intervalle floraison-coupe (IFC) en j

61

69

77

84

94

Nombre moyen de feuilles vivantes

6,4

6,4

5,47

5,08

4,14

Nombre de régimes

24

26

25

27

27

Nombre de doigts

2304

2444

2525

2673

2710

Figure 4 - Évolution des taux de matière sèche de la pulpe et de la peau de doigts de plantains récoltés à des stades de maturation différents, exprimés en sommes thermiques.

Figure 5 - Évolution de la coloration de la pulpe de plantain, en fonction de valeurs croissantes de sommes thermiques traduisant le stade de maturation des fruits.

Figure 6 - Persistance de la coloration verte de doigts de plantain lors du stockage des récoltes à température ambiante, après récolte à des stades de maturation différents exprimés en sommes thermiques.

Pour un cultivar donné, les personnes qui interviennent dans le circuit de commercialisation du plantain définissent un régime de qualité, d'abord, comme un régime qui a atteint un bon développement sur pied au moment de sa récolte; cela lui confère des caractères assez objectifs et mesurables: doigts de grosse taille aux angles suffisamment arrondis et à la pulpe de couleur saumon assez prononcé. Ces paramètres conditionnent le prix de base de la denrée. Le consommateur tire une certaine satisfaction à acquérir un produit qui, à ses yeux, a atteint toutes ses potentialités.

En se basant sur ces critères, les régimes de French sombre ont pu être succinctement classés en trois catégories, fonctions des stades de récolte analysés

- la classe de qualité supérieure, dite de qualité 1, de 17,2 kg (poids moyen), correspond à une récolte au stade de somme thermique de 1200 °Cj,

- la classe de qualité moyenne, de qualité 2, de 16 kg, correspond à une récolte à 1 0001 100 °Cj,

- la classe de qualité inférieure, de qualité 3, de 13,2 kg, est récoltée à 800-900 °Cj.

Chacune de ces catégories justifie d'un prix initial spécifique selon le professionnel de la filière de commercialisation concerné (tableau II).

Dans un deuxième temps, ce prix initial de la denrée est pondéré par l'aspect plus ou moins frais du régime. Un régime flétri, par exemple, montrera des signes évidents de dessèchement et de noircissement de la hampe et les pédoncules, ramollis, ne pourront plus tenir les doigts en position érigée. Le marchandage intervient à chacune des étapes du marché; il prend en compte, alors, certains facteurs autres que ceux liés à la qualité à la récolte:

- nécessité pour le vendeur de solder et de libérer son étalage afin de pouvoir accueillir des livraisons de plantains plus frais,

- préférence du consommateur pour un régime bien tenu et plus propre dans un système où, paradoxalement, la marchandise est manipulée et étalée le plus souvent à même le sol au cours de sa commercialisation.

Cette caractéristique de la filière traditionnelle représente une différence fondamentale par rapport à un circuit d'exportation. Dans le cas de la filière traditionnelle qui alimente les marchés locaux, les acteurs du circuit de commercialisation attachent une importance secondaire au conditionnement. Ils ont en cela des préoccupations différentes des intervenants des filières d'exportation pour lesquels un conditionnement inadapté ou une présentation hors norme de la denrée peuvent être à l'origine d'une mauvaise appréciation de la marchandise pouvant conduire à un rejet.

intérêt du stockage par rapport à la qualité

Un stock de 165 régimes verts - 55 de chacune des qualités 1, 2 et 3 définies précédemment - a été placé soit en chambre froide soit à température ambiante. Leurs valeurs marchandes au prix grossiste-livreur, définies sur ce critère de qualité à la récolte, ont été de:

- 165 530 F CFA pour l'ensemble des régimes de la qualité 1,

-144 400 F CFA pour les fruits de qualité 2,

- 72 600 F CFA pour ceux de qualité 3, soit 382 530 F CFA pour l'ensemble du stock, le prix moyen étant de 2 318,36 F CFA/régime.

Les lots de fruits ont été observés après 10 et 20 j de stockage, afin de déterminer le nombre de régimes encore verts et de vérifier leur aspect (tableau III).

Au fur et à mesure que se prolonge le stockage, c'est au sein des lots de qualité 3 qu'il y a le plus grand nombre de régimes encore verts; cela apparaît logique, puisque la durée de vie verte est d'autant plus longue que la récolte est plus précoce. De la même façon, MAILLARD avait montré en 1991 que, dans le circuit de la banane d'exportation, le stade de récolte devait être ajusté aux délais de distribution du produit; si les qualités 2 et 3 pouvaient paraître moins intéressantes dans un dispositif de commercialisation rapide, ces données changeaient pour une vente plus étalée dans le temps et pour une distribution à longue distance.

Figure 7 - Persistance de la coloration vente de doigts de plantain lors du stockage des récoltes au froid (12 °C), après récolte à des stades de maturation différents exprimés en sommes thermiques.

En zone de production, le consommateur peut se procurer plus facilement et à moindre coût le produit de première qualité. Cependant, le ravitaillement, et surtout le maintien de quantités importantes de plantains de qualité 1 à l'état vert dans des marchés éloignés des lieux de récolte, nécessitent un dispositif de distribution rapide et la mise en place de systèmes de conservation, beaucoup plus efficaces que ne le requièrent les régimes de qualité 2 ou 3.

Figure 8 - Perte de poids pour des régimes de plantains récoltés au stade de 1 200 °Cj, comparée pour deux type de stockage: au froid (12 °C) ou à température ambiante (26-27 °C).

Le froid permet d'augmenter la durée de stockage, mais le fait de prolonger l'état vert du plantain s'accompagne d'une augmentation des charges et donc du coût de revient de la denrée. Sur la base du tarif local de consommation électrique en vigueur au moment de l'étude, soit 47 F CFA/kWh, le coût total des régimes en chambre froide après 10 et 20 j de conservation a été augmenté de 24 863 F CFA et 49 726 F CFA, respectivement.

Figure 9 - Évolution comparée des prix de deux régimes de plantains récoltés à des stades de maturation, donc de qualité, différents.

Sur cette base, après 10 j de stockage, tous les régimes étant encore verts, la majoration du lot a donc été de 6,5 % et le prix moyen du régime est passé à 2 469,05 F CFA.

Tableau II - Prix du régime de plantain (F CFA/kg), reflétant des différences de qualités à la récolte (juillet-août 1990) (N'DA ADOPO, 1992)

Degré de qualité

Stade producteur a

Stade grossiste-livreur b

Stade détaillant en régimes b

1

100

175

200

2

70

130

150

3

55

100

110

a province Sud-Ouest;
b marché central de Douala.

Après 20 j si tous les plantains avaient été encore verts, l'augmentation globale aurait été de 13 % et le régime aurait coûté 2 619,75 F CFA. Cependant, en considérant uniquement les fruits verts encore intacts, soit 100 % des qualités 3, 83 % des qualités 2 et seulement 21 % des qualités 1, la majoration a été de 17,43 % et le coût du régime est passé à 2 722,63 F CFA. En tenant aussi compte de la perte de poids observée à l'issue de la phase de stockage (figure 8), le coût de revient au kg du régime vert devient encore plus élevé. Ainsi, la conservation à basse température, qui augmente sensiblement le prix de vente du produit, n'est pas toujours justifiée; elle apparaît cependant intéressante pour les plantains de qualité 1, du fait de leur valeur marchande plus élevée que celle des autres catégories (tableau II).

Dans la pratique, les plantains sont commercialisés ou consommés à tous les stades de mûrissement. Les doigts mûrs à point (stade de couleur allant de 5 à 7) ont une valeur commerciale au moins égale à celle des doigts verts; les fruits trop mûrs (peau noirâtre) sont, en revanche, soldés. Pendant la saison de faible production, le rapport entre le prix des doigts mûrs à point et celui des doigts verts atteint les valeurs les plus élevées; il peut varier, fréquemment, de 1,3 à 2 (N'DA ADOPO, 1992).

La forte demande de plantains mûrs sur le marché local explique en grande partie pourquoi les pertes globales du produit sont peu importantes.

Le mûrissement, accompagné d'une diminution notable de poids (figure 8), conduit plutôt les acteurs de la filière traditionnelle à maintenir, voire augmenter, la valeur marchande du régime, lorsque, au cours de la première phase de commercialisation, les doigts sont encore relativement fermes.

L'évolution des prix sur les étals, de deux régimes de qualité 1 et 3 à la récolte, a pu être représentée en fonction du stade de mûrissement et de l'aspect des doigts (frais et brillant ou flétri) (figure 9). Un tel schéma montre que l'estimation de pertes basée uniquement sur des données pondérales n'est pas adaptée à la commercialisation de ce produit; la balance, en tant qu'instrument de pesée, n'est d'ailleurs pas utilisée dans la filière traditionnelle du plantain.

Une basse température, associée à une forte humidité, maintient plus longtemps l'aspect frais et brillant du régime, ce qui lui permet de garder une valeur marchande intéressante. La perte de fraîcheur, qui conduit à vendre les régimes verts en solde (figure 9), constitue, en fait, l'une des préoccupations majeures des acteurs intervenant en fin du circuit de commercialisation. Bien que les plantains ne soient pas pesés, l'emballage sous film de polyéthylène (COLLIN, 1991), en limitant les pertes de poids et surtout en prolongeant, simultanément, la durée de l'aspect frais, pourrait présenter un réel intérêt.


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