4.13. Amélioration du séchage solaire des légumes
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- Ibrahima Lo
INTRODUCTION
Depuis très longtemps la zone des Niayes située sur le litoral allant de Dakar à Saint-Louis est restée la principale région maraîchère du Sénégal. Elle approvisionnait en légumes tous les marchés de Dakar et même ceux de certaines régions. Mais avec les années successives de sécheresse qui se sont abattues sur les pays du Sahel, les agriculteurs n'arrivaient plus à subvenir à leurs besoins (matériel et alimentaire) avec les bénéfices réalisés durant la saison hivernale.
Des lors, il leur fallait développer d'autres activités pondant la saison sèche pour combler leurs déficits alimentaire et monétaire. C'est ainsi qu'un peu partout dans les autres régions du Sénégal se sont développés à côté des villages de petits jardins où on cultive : choux, tomate, oignon, gombo, oseille, persil, etc... Le maraîchage est surtout mené par les femmes. Il a apporté dos modifications alimentaires importantes et est devenu pour elles une activité économique, rémunératrice dont bénéficient également le carré et le quartier.
Mais ce développement très rapide du maraîchage a entrainé de grandes productions et a causé sur les marchés une offre beaucoup plus grande que la demande. Ce faisant, d'importantes quantités de légumes (tomate et oignon surtout) ont été perdues faute d'avoir été vendues, consommées ou conservées.
Certes dans certains villages des méthodes traditionnelles de conservation par séchage direct au soleil existent mais elles s'avèrent très limitées et peu efficaces.
Pour répondre à ce besoin certains centres de recherches comme le C.E.R.E.R. ont étudié et mis au point divers séchoirs solaires.
LE SECHAGE TRADITIONNEL
LES SECHOIRS
Le plus souvent il n'existe pas de séchoirs proprement dits. Les produits à sécher sont étalés dans un récipient ou sur une natte et exposés directement au soleil sur le toit des cases pour les mettre à l'abri des enfants et des animaux. Dans le cas des oignons le séchage peut se faire sur pied en terre. C'est-à-dire avant de les déterrer, on laisse les oignons en terre durant une semaine sans les arroser, ensuite on les expose au soleil.
LES PRODUITS SECHES ET LES METHODES DE PREPARATION
Les produits maraîchers qui sont généralement séchés sont : gombo, oignon, tomate, oseille (bissap), choux...
Les méthodes de préparation des produits avant séchage dépendent de leur taille, leur texture et leur forme. Elles consistent à briser l'enveloppe qui s'oppose à la migration de l'eau contenue dans le produit.
Ces méthodes de préparation sont :
Produits : | Méthodes de préparation |
Tomate | - Couper en tranche |
- Piler et mettre en boulettes ou galettes | |
Oignon | - Sur pied en terre |
- Couper en tranches | |
- Piler avec du sel et mettre en boulettes ou galettes | |
Gombo | - Couper en rondelles |
Chou | - Détacher en feuilles |
Bissap (oseille) | - Détacher en feuilles |
LE SECHAGE
Cette méthode de séchage se caractérise par :
Le temps de séchage est variable, il dépend de l'ensoleillement et du type de produit. Il est généralement de 3 à 4 jours. Les quantités transformées par-séchage traditionnel sont très faibles.
LE SECHAGE SOLAIRE
BUT DU SECHAGE SOLAIRE
Le but du séchage solaire est d'accroître les capacités et les performances du séchage traditionnel :
PRINCIPE DESFONCTIONNEMENT
Cette méthode consiste à agencer certains matériaux (corps transparent, corps noir et corps isolant) pour créer un effet de serre dans une enceinte. Cet effet de serre sera responsable de l'augmentation de la température de l'air dans l'enceinte et favorisera sa circulation naturelle. Les produits à sécher sont étalés sur des claies aménagées à l'intérieur du séchoir.
LES SECHOIRS
Les séchoirs employés sont du type direct ou mixte.
Séchoir tente
Ce séchoir a la forme d'une tente canadienne composée :
- Surface d'exposition : 3,35 m²
- Coût total : 24.000 F.CFA
- Capacité : Variable suivant la densité et la forme du produit
Séchoir "CASE"
Il a la forme d'une case d'où son nom. Il est constitué par :
- Surface d'exposition : 0,5 m²
- Coût total : 3.700 F.CFA
Séchoir "BAN AK SUUF" ou séchoir "BAS"
Il est entièrement construit avec de l'argile et du sable, Il comprend également une couverture transparente, une claie de séchage et un absorbeur (charbon de bois)
Surface d'exposition : 0,5 m²
Coût total : 1.000 F.CFA
Séchoir "MIXTE"
Il est constitué par les mêmes matériaux utilisés dans le séchoir tente mais diffère par sa forme et sa partie préchauffage ou capteur.
Surface d'exposition : 2,8 m²
Coût total : 26.000 F.CFA
LES RESULTATS OBTENUS
Les conditions optimales de séchage solaire correspondent à un maximum de température admissible et un minimum de taux d'hygrométrie de l'air.
Pour éviter de cuire les produits ou de détruire certaines vitamines, il est conseillé de ne pas dépasser la température maximum de 55 C. Cette température intérieure peut être régulée grâce à des couvertures aménagées sur les séchoirs.
LES SECHOIRS
Malgré leur différence de forme et de matériaux employés, donnent des températures assez voisines et presque le même temps de séchage pour les différents produits maraîchers.
Produit | Perte de poids | Durée de séchage |
Oignon | 88% | 2 journées |
Tomate | 77% | 2 journées |
Gombo | 81% | 1 journée |
Feuille de chou | 82% | 1/2 journée |
Feuille de bissap | 85% | 1/2 journée |
Tout ce qui est feuille (chou, oignon, bissap ...) peut sécher en une journée. Tandis que les boulettes ou les galettes obtenues après avoir pilé certains produits (tomate, oignon) ne sèchent qu'à la périphérie la première journée, le séchage complet n'intervient qu'à la deuxième journée.
Les produits séchés gardent toujours leur couleur initiale. On peut réhydrater les feuilles séchées en les plongeant dans de l'eau chaude. On obtient ainsi une nouvelle feuille souple qui peut entrer dans la préparation des sauces.
Les produits séchés peuvent être gardés au moins trois mois dans des sacs en papier bien refermés sans qu'ils se dégradent.
EXPERIENCE DU C.E.R.E.R. EN MILIEU RURAL
La démarche du C.E.R.E.R. ne consiste surtout pas à commercialiser les séchoirs solaires mais à favoriser leur promotion au niveau des populations directement intéressées par le problème de la conservation des aliments. Ceci se fait en général en s'appuyant sur une structure locale (coopérative, groupement de jeunes' associations de femmes ...) et de la manière suivante :
KOUMBIDIA (Région de Sine Saloum à 12 km de Koungheul)
Ce projet a eu pour point de départ une enquête sur le maraîchage que le GRET (Groupe de Recherche et d' Echanges Technologiques) a mené à Koungheul. Cette enquête a débouché sur les problèmes d'exhaure, de transport et de conservation des légumes.
Une première mission en 1981 a permis d'introduire 3 tentes solaires réparties dans les différents quartiers de ce village Des premiers résultats satisfaisants ont été obtenus. Les villageois ont pu construire eux mêmes un séchoir type "BRACE" à usage individuel.
Une enquête menée sur l'utilisation des séchoirs a permis de constater que les femmes souhaitaient avoir un séchoir individuel plutôt qu'une tente collective et qu'elles étaient même prêtes a participer aux frais de construction.
C'est ainsi qu'en Mars 82 le CERER a réalisé en collaboration avec les artisans du village 25 séchoirs solaires de type "CASE".
L'ISBA (Institut Sénégalais de Recherche Agronomique) intervient également dans ce projet au niveau de l'encadrement des paysans, de la sensibilisation, du suivi des séchoirs et des produits séchés.
DJIRAGONE
Djiragone est un village de la Casamance, situé dans l'arrondissement de Bounkiline. Il se distingue par le dynamisme de son activité de maraîchage.
En 1982, suite à de nombreuses pertes qu'ils avaient enregistrées au niveau de la production de tomate et d'oignon' les responsables de l'AJAC (Association des Jeunes Agriculteurs de la Casamance) ont contacté le C.E.R.E.R. pour qu'il les aide à résoudre le problème épineux de la conservation des légumes.
C'est ainsi qu'en 83 le CERER et l'AJAC ont organisé un séminaire de formation sur les techniques de construction des séchoirs salaires. Séminaire qui regroupait 30 participants dont des femmes et des artisans locaux (menuisiers, maçons, forgerons' vanniers). Pendant deux semaines' différents modèles de séchoirs ont été construits et testés :
- 8 séchoirs mixtes, 3 séchoirs "CASE" et 3 séchoirs "BAS".
Des résultats satisfaisants ont été obtenus. Les produits séchés ont été conserves dans des sacs en papier ou en plastique et seront consommés bien après la saison maraîchère.
De l'avis des femmes, ces légumes séchés gardent un bon goût (surtout les tomates qui donnent un concentré sec après séchage).
Le suivi scientifique et technique permettra de déterminer lequel des séchoirs convient le mieux aux populations de cette région. Ce projet se poursuivra dans d'autres villages de la Casamance.
CONCLUSION
Au Sénégal le séchage dos aliments n'est pas un fait nouveau. Il est fréquent de voir les femmes sécher du couscous, de l'arachide' du maïs . . . Certes l'utilisation des séchoirs solaires est toute récente mais dans beaucoup de villages cette nouvelle technologie semble bien acceptée.
La fabrication et l'utilisation des séchoirs solaires en milieu rural ne posent aucun problème, la seule difficulté réside dans l'approvisionnement en polyéthylène (souvent il faut venir jusqu'à Dakar pour en trouver). Ces séchoirs sont très économiques car on utilise que des matériaux locaux ou localement disponibles pour leur fabrication.
Sur le plan économique, certains produits séchés tels que tomates' feuilles de choux, oignons ... qui sont utilisés au niveau de certains villages dans la préparation des sauces, ne sont pas encore commercialisés dans les marchés où on ne trouve que le gombo et le "bissap" séchés.
La présence en toute saison de légumes frais importés ne favorise pas la vente des produits séchés. Toutefois' une meilleure sensibilisation des populations avec l'appui des médias pourrait favoriser une plus grande diffusion des séchoirs solaires au Sénégal.
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