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7.
Résumé et conclusions
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D'une manière générale, l'approvisionnement de la
population en denrées alimentaires est marqué par un certain
décalage dans le temps et l'espace entre la production et la
consommation, décalage qui est compensé par le stockage. Les
pertes qui se produisent au cours de la phase de post-récolte se
traduisent par une réduction du volume potentiel de nourriture.
Depuis l'introduction dans quelques pays d'Afrique occidentale et
orientale du Grand Capucin des Grains (Prostephanus truncatus
HORN), un dangereux ravageur des stocks, on enregistre une forte
augmentation des pertes de post-récolte en général et des
pertes de stockage en particulier. Sur cette toile de fond, la
protection de post-récolte ainsi que la protection des stocks
revêtent une importance croissante en tant que possibilité
d'améliorer l'offre en denrées alimentaires.
Depuis, un très grand nombre d'études ont été consacrées
à la biologie des ravageurs des stocks, aux techniques de
stockage et à l'efficacité des mesures (chimiques) de
protection des stocks. En revanche, les études portant sur
l'évaluation économique des pertes, ainsi que sur la
rentabilité des mesures de protection des stocks et des
systèmes de stockage sont soit inexistantes, soit très
insuffisantes.
Cette étude avait pour but:
- L'analyse du système de post-récolte du maïs au Togo.
Ceci implique une description détaillée des filières
du mais, depuis la production jusqu'à la consommation
finale, la saisie des "flux de maïs quantitatifs
dans le temps, ainsi qu'une description et une analyse du
système de post-récolte des petites exploitations
agricoles.
- La détermination, par le biais des essais, des pertes de
denrées stockées lorsque le stockage est effectué par
les paysans, les indications concernant les pertes
constituent en effet une condition préalable
fondamentale à la réalisation d'analyses économiques
dans le domaine de la protection des stocks. Les pertes
sont déterminées pour différentes méthodes de
stockage et de protection des stocks, à l'aide de
différentes méthodes de saisie des pertes.
- La mise sur pied d'une approche adéquate (modèle) en
vue de répondre aux questions économiques que pose la
protection des stocks. Cette approche s'appuie sur les
données du système de post-récolte régional et paysan
déterminantes pour la protection des stocks, ainsi que
sur les résultats des expériences.
- A partir des résultats des enquêtes et des calculs
modèles, la définition des contenus
d'assistance-conseil en vue d'une protection des stocks
assurée par les paysans, et l'élaboration de conseils
utiles pour le travail d'assistance-conseil du Service
National de la Protection des Végétaux.
Les informations utilisées au cours de cette étude
proviennent de sondages et d'enquêtes réalisés durant un
séjour sur le terrain, au Togo, d'octobre 1986 à février 1989.
La région choisie était la région côtière (Région Maritime)
située au sud du Togo, dans laquelle on cultive principalement
le maïs Le mais est pour la population la principale denrée
alimentaire de base en même temps qu'une source de revenus
importante pour un grand nombre de petites exploitations axées
sur la subsistance. Cette région coïncide également avec le
principal territoire où sévit le Grand Capucin des Grains,
lequel cause des pertes considérables, notamment au niveau du
stockage du maïs.
Dans le cadre de la présente étude, on a procédé à des
essais "on-farm" durant trois périodes de stockage
dans (n = 24) fermes expérimentales. Au cours des essais, on a
déterminé les pertes de denrées stockées dans le temps,
testé de nouveaux insecticides (binaires) et saisi les
prélèvements de maïs ainsi que son utilisation, le tout en
corrélation avec différentes méthodes de stockage (stockage en
épis et stockage en grains) et mesures de protection des stocks
(moyens traditionnels, produits chimiques) et selon différentes
méthodes de détermination des pertes.
La collecte des données socio-économiques du système
exploitation/ménage/famille s'est effectuée à trois niveaux.
Le premier niveau englobait au total n = 159 exploitations (53
villages, 3 exploitations/village), le second n = 20 fermes
expérimentales et le troisième une partie (n = 6) des fermes
expérimentales. L'enquête complète a été subdivisée en
trois phases d'interviews. On a interrogé sur chaque
exploitation toutes les personnes cultivant ou stockant du maïs,
Au fur et à mesure du travail, quelques collectes de données
complémentaires furent intégrées à l'enquête. Ces collectes
de données complémentaires avaient pour but de permettre une
analyse des principaux systèmes de commercialisation, une
analyse de l'utilisation du Neem comme moyen de protection des
stocks et une évaluation des magasins fumigables gérés par le
Service National de la Protection des Végétaux.
A l'intérieur du système de post-récolte régional, le
maïs parcourt un certain nombre de filières, variables en
fonction du lieu de consommation final et de son utilisation.
Selon le degré de commercialisation, différentes personnes
(décideurs) ont la possibilité d'influer sur le maïs au sein
du système de post-récolte, et ce au niveau du passage d'une
phase à la suivante (transport), de l'immobilisation lors d'une
phase (stockage) et de la transformation en d'autres produits
(traitement).
Dans la Région Maritime, le maïs, est stocké sur les
exploitations agricoles, chez les commerçants, auprès de
l'organisme public de commercialisation TOGOGRAIN, ainsi que chez
le consommateur final des villes. Les trois quarts de la récolte
de maïs sont stockés chez les paysans et ne sont
commercialisés par le biais du système de commercialisation
traditionnel qu'en cas de besoin de numéraire. Le système
public de commercialisation ne joue qu'un rôle marginal. Le
commerce du maïs, relève presque exclusivement du domaine de
compétence des femmes.
Les résultats de l'analyse du système peuvent être
récapitulés comme suit:
- Une partie (15 %) des exploitations, dont la plupart sont
orientées vers la subsistance et axées sur la
production de végétaux (la production animale ne joue
qu'un rôle marginal) est dirigée par des femmes. En
raison de la répartition bimodale des pluies, une grande
partie de la surface (physique) cultivée (1,39
ha/exploitation) est cultivée en maïs, (essentiellement
culture mixte) par la main d'oeuvre familiale (3,5
personnes/exploitation). Le maïs constitue la denrée
alimentaire de base des membres de la famille
(8/exploitation) ainsi que, pour un grand nombre
d'exploitations (40 %), la principale source de revenus.
Le maïs, est généralement vendu à intervalles
irréguliers (61 %) en cas de besoin d'argent pressant
(68 %), essentiellement à des commerçants (89 %) dans
le cadre du marché du village (57 %).
- Au niveau paysan, le stockage se fait presque
exclusivement en épis (99 %) avec les spathes. Le
stockage en grains (habitation, magasin fumigable) est
peu répandu. Le stockage en épis se fait soit dans
l'habitation (48 %) soit dans le grenier traditionnel (51
%), ce dernier type, qui peut également se faire dans
les champs (20 %), ayant la préférence des hommes.
Construit exclusivement avec des matériaux localement
disponibles, le grenier traditionnel est spécifique
(type "Ebli-Va", type "Kédélin" )
de certaines ethnies (Ewé, Mina) et comporte des
caractéristiques multifonctionnelles (séchage,
stockage, protection contre les insectes nuisibles,
symbole d'aisance).
- Pour protéger le maïs stocké, on utilise des rites de
protection puisant leurs racines dans la croyance
animiste, des produits de protection des stocks
traditionnels (feuilles de neem, résidus de la
fabrication de l'alcool de palme, cendre), ainsi que des
insecticides chimiques ("Actellic", Sumithion,
"K-Othrine" ). 28 % seulement des paysans (chez
les femmes, la proportion est encore inférieure)
protègent leur maïs à l'aide de moyens de protection
des stocks, les moyens traditionnels étant moins
répandus (11 %) que les produits chimiques (17 %). Un
paysan sur dix traite le maïs stocké avec des produits
de protection des stocks non agréés (8 % des paysans
utilisent le DDT, dont l'usage est interdit).
Les résultats des essais "on-farm" peuvent se
résumer comme suit:
- La principale cause de dégât constatée lors de tous
les essais était l'infestation par les coléoptères,
suivie par les larves de lépidoptères. Les dégâts dus
aux termites, aux rongeurs et aux oiseaux étaient
pratiquement inexistants. On retrouvait dans tous les
essais la même diversité d'espèces de coléoptères
nuisibles. Une infestation par Prostephanus truncatus
n'apparaissait qu'à partir du 3ème mois de stockage.
C'est avec les variantes de stockage en sacs que
l'attaque de ce coléoptère se montrait la moins
importante.
- Lors du premier essai, l'évolution des pertes
présentait un cours analogue pour toutes les variantes.
Au moment de l'emmagasinage, les pertes étaient de
l'ordre de 1 %, pour atteindre 5 à 6 % au bout du Sème
mois de stockage.
Lors du second essai, les pertes à l'emmagasinage
étaient de l'ordre de 4 % pour la variante stockage en
grenier et avec traitement par les moyens traditionnels.
Les autres variantes présentaient au même moment des
pertes de 1 %. Au bout d'une période de stockage de six
mois, les greniers non traités présentaient des pertes
de 10 %, celles-ci atteignant 20 % (infestation élevée
dans les champs) pour les greniers traités avec les
moyens traditionnels de protection des stocks. Les
insecticides binaires ramènent le taux de pertes à 6 %
dans le cas du stockage en grenier et à moins de 2 %
pour le stockage en grains.
Lors du troisième essai, les pertes étaient de l'ordre
de 2 % au moment de l'emmagasinage. Pour toutes les
variantes, on ne constatait aucune augmentation des
pertes jusqu'au 4ème mois de stockage. A la fin du 8ème
mois, les pertes de la variante non traitée étaient de
l'ordre de 10 %. Les deux variantes traitées aux
insecticides binaires présentaient pendant toute la
durée du stockage une augmentation de pertes de moins de
0,5 %.
- Dans les conditions pratiques des essais
"on-farm" les données fournies par la méthode
dite du poids des échantillons étaient irréalistes.
- Les résultats des essais montrent que, en cas de
stockage en grenier, il est possible de réduire les
pertes en utilisant des insecticides binaires. C'est le
stockage en sacs, combiné avec un traitement aux
insecticides binaires, qui offre la meilleure protection.
On a procédé à une définition de la notion de procédé de
protection des stocks (englobant le procédé de stockage et la
mesure de protection des stocks), à une explication des bases
méthodologiques présidant à la détermination de l'efficacité
des procédés de protection des stocks (réduction des pertes en
termes financiers sur la base des pertes quantitatives cumulées
de denrées stockées), au calcul des coûts occasionnés par les
procédés de stockage (entrepôt, auxiliaires de stockage,
traitement, stockage) et des coûts des mesures de protection des
stocks (moyens, acquisition, application), ainsi qu'à l'analyse
des approches méthodologiques (approches partielles, approches
systématiques) des problématiques liées à la protection des
stocks.
On a examiné, dans le cadre d'un modèle, l'avantage (du
point de vue de l'exploitation individuelle) de 13 procédés de
protection des stocks différents, à l'aide de la comparaison
dite de différence des procédés, les procédés avec stockage
en grains, les procédés avec mesures de protection des stocks
et les nouveaux procédés ou les procédés peu répandus
jusqu'à maintenant "crib" petit entrepôt, magasin
fumigable) étant soumis à une analyse plus précise. Les
paramètres (quantitatifs) requis par une appréciation
économique (structure des coûts des procédés de stockage et
des mesures de protection des stocks, durée d'utilisation
annuelle de l'entrepôt et des auxiliaires de stockage, coûts
d'exploitation de la main d'oeuvre paysanne, degré
d'infestation, quantité de production et de stockage, durée du
stockage, mode et quantité de prélèvement, utilisation du
maïs prix du maïs ont été déduits des résultats des
enquêtes et des essais effectués "on-farm" puis
combinés (variation multiple des paramètres des modèles) entre
eux dans les calculs modèles de manière à pouvoir intégrer
dans les déductions des calculs modèles un maximum de
combinaisons de paramètres que l'on puisse qualifier
d'importantes pour la pratique. Les calculs modèles montrent que
- les coûts de stockage (procédés de stockage) sont
très nettement supérieurs aux coûts occasionnés par
les mesures de protection des stocks.
- le stockage du maïs tel qu'il est pratiqué par les
paysans entraîne des pertes quantitatives réelles et
des pertes financières beaucoup moins importantes qu'on
ne le supposait généralement.
- la supériorité économique des méthodes de stockage en
"crib" n'est pas évidente, que celle des
procédés de stockage en magasin fumigable est à
remettre en question et que celle des procédés de
stockage en petit entrepôt est soumise à un certain
nombre de conditions déterminées.
- la mise en place d'une mesure de protection des stocks
n'est recommandable d'un point de vue économique que si
le maïs, est entreposé plus de trois mois.
- les procédés de stockage en grains ne sont
recommandables d'un point de vue économique que s'il
n'est pas nécessaire de construire un entrepôt et si la
main d'oeuvre paysanne ne constitue pas un facteur rare.
L'appréciation globale des méthodes de protection des
stocks, compte tenu des facteurs économiques,
socio-économiques, socioculturels et techniques, ainsi que des
exigences à l'encontre de l'économie nationale, débouche sur
les recommandations suivantes en matière d'assistance-conseil:
- Il serait préférable de renoncer à construire de
nouveaux magasins fumigables. Cette méthode de stockage
est contestable d'un point de vue économique, pose des
difficultés d'organisation et laisse place à certains
doutes sur le plan de l'économie nationale. Les
entrepôts érigés jusqu'à maintenant devraient
(doivent) continuer d'être gérés par le Service
National de la Protection des Végétaux.
- On ne saurait (actuellement) recommander le stockage en
"Crib" Il faut examiner en l'occurrence s'il
est possible de réduire considérablement les coûts de
construction (coûts des matériaux).
- Bien que le stockage en petit entrepôt semble plus
prometteur que le stockage en magasin fumigable, il n'est
néanmoins pas (encore) possible, dans l'état actuel des
connaissances, de recommander sa mise en place. Il existe
encore un certain nombre de questions en suspens, qui
devront être élucidées au cours d'une phase pilote
destinée à la construction des petits entrepôts.
- Le stockage en grains est recommandé pour les
exploitations qui, jusqu'à présent, stockaient leur
maïs dans l'habitation. Au sein de ce groupe
d'exploitations, on peut notamment recommander cette
forme de stockage pour le "maïs commercial".
- Les résultats obtenus ne permettent actuellement pas
(encore) de recommander l'utilisation des moyens
traditionnels de protection des stocks, du fait que
l'efficacité de ces moyens n'a pas encore été
examinée de façon suffisamment approfondie dans les
conditions propres au Togo.
- L'utilisation de moyens de protection des stocks peut
être recommandée pour tous les procédés de stockage
du fait qu'aucun problème de résidus n'est à craindre
et qu'elle n'est pas liée à des charges élevées sur
le plan des finances ni de la main d'oeuvre. Plus le
coléoptère nuisible Prostephanus truncatus sera
répandu, plus il sera recommandé d'appliquer un
traitement prophylactique du mais stocké.
- La formation en matière d'utilisation des produits
chimiques de protection des stocks reçue par les
conseillers opérant sur le terrain devra mettre l'accent
sur les problèmes (points faibles).
- Dans le domaine de la protection paysanne des stocks, les
femmes constituent le groupe de personnes ayant le plus
besoin de conseils et d'assistance.
- Il est recommandé, à titre de mesures d'accompagnement
destinées à étayer le travail d'assistance-conseil, de
proposer des "boîtes" pour l'application des
moyens de protection des stocks et des égreneurs de mais
à main, ces deux auxiliaires pouvant être fabriqués
dans la région.
Les résultats de l'enquête montrent que les pertes de
"30 %" dont il est très souvent question dans les
ouvrages spécialisés constituent une indication bien peu
probante. On ne saurait exprimer par un seul chiffre la
problématique des pertes intervenant dans le cadre du système
de post-récolte des paysans sans présenter les
caractéristiques des principaux éléments du système à l'aide
de paramètres standardisables, ni saisir quantitativement les
interdépendances essentielles des éléments du système. Les
problématiques (socio)économiques posées par la protection des
stocks et le stockage exigent encore une action scientifique de
grande envergure, notamment au niveau de la méthodologie. La
présente étude propose des solutions possibles, lesquelles
demandent à être soumises à une analyse critique et
développées dans le cadre de travaux de recherche futurs. Comme
concept de base pour l'élaboration de solutions pratiques aux
problèmes, on optera pour un point de vue global (holiste) qui,
au-delà des domaines de spécialisation, sera axé sur la
situation concrète (interdisciplinarité) et qui prendra en
compte les modifications du système au fil du temps (dynamique).
Oui.
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