4 Interactions entre Prostephanus truncatus et Teretriosoma nigrescens
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4.1 Influence de teretriosoma nigrescens dans
des conditions proches de la réalité
4.2 Comparaison de l'efficacité de Teretriosoma
nigrescens au Togo et au Costa Rica
4.1 Influence de teretriosoma nigrescens dans des conditions proches de la réalité
4.1.1 Matériels et méthodes
4.1.2 Populations de ravageurs et d'insectes
utiles
4.1.3 Etat des dommages et pertes
Avant de lâcher le prédateur au Togo, il s'agissait en l'occurrence d'étudier dans des conditions de quarantaine l'influence de l'insecte utile importé T. nigrescens sur P. truncatus, le ravageur introduit dans le pays. A cette fin, on a installé des greniers à mais du type de ceux utilisés habituellement dans le sud du Togo, en les isolant dans une cage de toile métallique destinée à empêcher toute immigration ou émigration des insectes. De manière à rassembler tout de même dans ces greniers un éventail de ravageurs analogue à celui qui apparaît dans le contexte naturel, le mais, avant fermeture de la cage et introduction du prédateur, a été exposé durant une période de 4 mois à l'infestation naturelle par les insectes nuisibles.
En août 1989, 6 greniers expérimentaux du type traditionnel "Ebli-va" ont été érigés sur une plate-forme de béton (6 m sur 10) préparée à cette intention (fig. 17). Sur le bâti inférieur en bois des greniers (80 cm de haut), lequel comportait quatre pieds, on a installé une plate-forme (120 cm de long, 120 cm de large) construite dans les espèces de bois couramment utilisées dans la région. L'emmagasinage du mais (environ 200 kg d'une espèce locale à grains jaunes par grenier) a eu lieu les 23 et 24 août 1989. Les 15 et 16 novembre 1989, les épis de mais ont été retirés de la totalité des greniers et systématiquement mélangés. Les greniers ont été ensuite reconstitués. Cette opération avait pour but de garantir une répartition homogène des insectes ravageurs dans tous les greniers.
Cage expérimentale
Cette cage en toile métallique (5 m de largeur, 9 m de longueur et 2,50 m de hauteur) (fig. 17), était partagée en deux moitiés dans le sens longitudinal, chaque demi-espace renfermant quatre cellules disposées les unes derrière les autres. Il s'agissait dans chaque cas de trois cellules expérimentales (2,50 m sur 2,50 m) et d'une entrée (1,50 m sur 2,50 m) servant de sas. Les deux demi-espaces n'était pas reliés entre eux. A l'intérieur de chaque demi-espace, chaque cellule était reliée à la suivante par une porte. Chaque moitié de cage a été utilisée pour les trois répétitions effectuées sur une même variante. Le bâti de la cage était en fer plat, sur lequel on avait appliqué un produit antirouille. La toile métallique en acier fin (mailles de 0,5 mm de large) était tendue entre les fers plats. Pour en garantir l'étanchéité absolue, cette toile avait été trempée dans un agent de densification des plastiques. L'écoulement d'eau était assuré séparément pour chaque moitié de la cage par des siphons aboutissant à des conteneurs de récupération fermés en béton.
Introduction de T. nigrescens
Le transfert des T. nigrescens de l'Institut fédéral de biologie (BBA) de Berlin à Lomé s'est déroulé le 17 novembre 1989 dans le respect des directives concernant la quarantaine. Préalablement à ce transfert, 5 à 6 générations du prédateur lequel avait été collecté au Costa Rica en novembre 1988 - avaient été mises en observation en quarantaine au BBA, multipliés et soumis à un examen de dépistage d'agents pathogènes. Les animaux ne présentaient aucun agent pathogène ni antagoniste. L'introduction du prédateur dans les cages, à raison de 2 000 adultes par répétition, a eu lieu le 18 décembre 1989.
Echantillonnage et évaluation
Les premiers prélèvements d'échantillons de maïs ont été effectués en août 1989, aussitôt après l'emmagasinage. Après deux autres échantillonnages de 100 épis à un mois d'intervalle, on a observé une pause, pendant laquelle on a mélangé les épis, érigé de nouveaux greniers et construit la cage au-dessus des greniers. Après la fermeture de cette cage, mais avant l'introduction de T. nigrescens, on a recommencé à prélever régulièrement des échantillons. Ces échantillons ont été placés dans une caisse métallique et fumigés à l'hydrogène phosphoré dans l'entrée de la cage durant au moins une semaine avant d'être soumis à évaluation. L'évaluation a été effectuée individuellement pour chacun des 100 épis de l'échantillon. Pour ce qui est du calcul des pertes, on s'est servi de la méthode du comptage et du pesage (chapitre 2.1.2).
Nous nous sommes limités dans la présentation des résultats aux principaux ravageurs primaires et paramètres de pertes. On trouvera les résultats complets chez HELBIG (1993).
4.1.2 Populations de ravageurs et d'insectes utiles
L'étude des interactions entre P. truncatus et T. nigrescens, de même que l'évolution démographique qui en découle pour le ravageur constituent l'objet essentiel des recherches présentées ici. Au-delà, il était toutefois intéressant d'observer l'évolution démographique des autres ravageurs au cas où il existerait également entre eux et le prédateur des rapports particuliers.
P. truncatus
L'influence du prédateur sur l'évolution démographique du ravageur s'est manifestée au bout de 2 mois déjà après son introduction, et cela à travers le nombre de P. truncatus adultes trouvés (fig. 18). A cette date précoce, il n'y avait qu'une différence relativement minime et pas encore significative de 301 coléoptères entre les deux variantes. Au cours des mois suivants, on a enregistré dans la variante sans T. nigrescens une forte croissance de la population de P. truncatus, qui s'est traduite au bout de 8 mois par un maximum de 4 086 adultes pour 100 épis.
Comparée à l'évolution démographique observée dans le témoin, le ravageur a connu dans la variante impliquant T. nigrescens une croissance démographique fortement limitée. Le nombre maximum de P. truncatus adultes, I 1 17 coléoptères, a été obtenu au bout de 7 mois. A l'issue des 9 mois d'essai, le nombre de P. truncatus adultes était, sous l'influence du prédateur, inférieur de 79,8 % (760) à celui trouvé dans le témoin (3 670). La mise en oeuvre de T. nigrescens a donc permis de circonscrire très efficacement la croissance démographique du grand capucin du mais. Du fait que seuls les animaux adultes ont été recensés dans le cadre de cet essai, l'efficacité du prédateur ne s'est toutefois manifestée nettement qu'avec un certain décalage temporel.
T. nigrescens
A la suite de son transfert du Costa Rica au Togo, via Berlin, le prédateur a été introduit dans un nouvel habitat. Il règne dans ce nouvel habitat des conditions environnementales différentes de celles de sa région d'origine, l'Amérique centrale. L'essai décrit s'étant déroulé dans une cage de toile métallique fermée, le nombre des facteurs environnementaux était nécessairement limité. On peut par conséquent considérer ici les conditions climatiques comme facteur d'influence essentiel.
T. nigrescens n'a eu visiblement aucune difficulté majeure à s'adapter à son nouvel environnement (fig. 19). La population n'a cessé de s'accroître pendant toute la durée de l'essai, parvenant au bout de 9 mois à une densité moyenne de 876 individus adultes pour 100 épis.
Si l'on considère à présent l'abondance de T. nigrescens en comparaison de la population de P. truncatus, on arrive au bout de 9 mois à un rapport proie-prédateur de 1 contre 1,2. Bien que l'on ait constaté dès le début de cet essai un rapport proie-prédateur de 3,6 contre 1, donc très étroit comparé aux recensements effectués au Costa Rica en milieu naturel (cf. BÖYE, 1988), ce rapport s'est encore resserré au cours du stockage.
S. zeamais
S. zeamais doit être considéré comme le principal ravageur à part P. truncatus, puisque aussi bien il est responsable pour une bonne part des dommages et pertes causés aux stocks de maïs. Il est donc intéressant, du point de vue de la physionomie des paramètres de pertes, d'observer son évolution démographique. Dans l'optique d'effets secondaires éventuels liés à la mise en oeuvre de T. nigrescens, il est par ailleurs important de comparer le développement de la population de S. zeamais avec et sans prédateur.
Jusqu'au quatrième mois de stockage, la densité de population de S. zeamais est demeurée à son niveau initial de 300 à 400 coléoptères environ pour 100 épis (fig. 20). Ce n'est qu'au bout du cinquième mois de stockage que la population a commencé d'augmenter de façon sensible. Pendant les mois qui ont suivi, les populations des deux variantes ont connu une progression presque parallèle, atteignant après 9 mois d'essai une densité respective de 2 048 et 2 308 coléoptères pour 100 épis. Cet essai n'a pas permis d'établir une influence quelconque de T. nicrescens sur l'évolution démographique de S. zeamais.
Ravageurs secondaires
Eu égard à d'éventuels effets secondaires liés à la mise en oeuvre de T. nigrescens, il convient également de prendre en considération les populations de ravageurs secondaires. L'étude et l'interprétation de leur évolution démographique impliquent toutefois que l'on tienne compte de leur dépendance vis-à-vis des ravageurs primaires. Dans le cas du stockage du mais sous forme d'épis, notamment, l'infestation par les ravageurs primaires constitue une condition indispensable à une exploitation éventuelle du milieu nutritif par les ravageurs secondaires.
P. truncatus produit une quantité de farine de forage considérable, laquelle sert de nourriture de base aux ravageurs secondaires. Leur développement est par conséquent subordonné à la quantité de farine de forage produite et dépend indirectement de l'importance de la population du grand capucin du mais. L'influence de T. nigrescens sur la population de P. truncatus et, par suite, sur la quantité de farine de forage, a par là même un caractère indirect. Vu les conditions de réalisation de l'essai qui nous occupe, il n'était pas possible de distinguer ce type d'influence d'une éventuelle influence directe.
Les greniers expérimentaux disposés dans la cage de toile métallique étant exposés à l'infestation naturelle, les ravageurs secondaires qui s'y sont manifestés étaient les mêmes que dans les greniers des paysans, à savoir Carpophilus spp., C. quadricollis, T. castaneum, Cryptolestes spp., P. subdepressus et O. surinamensis. Concernant Carpophilus spp., C. qundricollis et O. surinamensis, on a constaté aussi bien dans les greniers avec et sans le prédateur une évolution démographique pratiquement identique. Pour ce qui est des Cryptolestes spp. et de T. castaneum, on a observé un léger recul de la densité dans les greniers où T. nigrescens était présent. P. subdepressus, en revanche, accusait une nette réduction de population.
S'agissant des Cryptolestes spp, et de P. subdepressus, il est possible qu'il y ait eu une influence indirecte de la part de T. nigrescens. Dans la variante impliquant le prédateur, la population du grand capucin du maïs avait nettement régressé (voir plus haut), entraînant du même coup une diminution de la farine de forage produite. Les ravageurs secondaires rencontraient donc dans cette variante des conditions nutritives moins favorables. Cette hypothèse pourrait également s'appliquer à T. castaneum. Ce ravageur étant aussi connu comme prédateur, on peut supposer là encore que la légère réduction de la densité démographique observée dans la variante avec prédateur était due à une moindre abondance de proies.
4.1.3 Etat des dommages et pertes
En complément de l'étude de l'évolution démographique des ravageurs, on a également procédé à une analyse de l'état des dommages et des pertes, analyse destinée à fournir certaines indications quant à l'efficacité de T. nigrescens au niveau des pertes causées par P. truncatus. Les résultats n'en sont toutefois pas entièrement fiables dans la mesure où l'essai s'est déroulé seulement dans des conditions proches de la réalité et non pas dans le contexte naturel.
Dommages
Au moment de l'introduction du prédateur T. nigrescens dans les greniers à maïs, les dommages s'établissaient aux alentours de 10 % dans les deux variantes (fig. 21). Au cours des quatre mois suivants, on a enregistré une légère progression des dommages, qui atteignaient alors environ 20 % dans les deux variantes, une nette différence apparaissant par la suite.
Dans la variante sans prédateur, on a enregistré une forte augmentation des pertes qui s'est maintenue jusqu'à la fin de la période d'observation. A l'issue de la période de stockage de 9 mois, les dommages causés dans le témoin s'élevaient à 54,1 %.
Dans les greniers à maïs où l'on avait mis T. nigrescens en oeuvre, on a également constaté une augmentation des dommages, beaucoup moins accentuée cependant que dans le témoin. De 20 % au cinquième mois de stockage, les dommages sont passés à 30 % environ au cours du sixième mois. Les dommages se sont maintenus à ce niveau pendant la période qui suivi, pour s'établir à 31,6 % à la fin des 9 mois d'essai, ce qui, par rapport au témoin, représente une réduction statistiquement significative de 41,6 %.
Pertes
Parties d'un chiffre de 3 %, les pertes n'ont progressé que faiblement dans les deux variantes au cours des trois premiers mois qui ont suivi l'introduction du prédateur, passant alors à 7 % (fig. 22). Par la suite, les pertes enregistrées dans les greniers à maïs où le prédateur était absent ont augmenté beaucoup plus fortement que dans la variante impliquant T. nigrescens. Cette évolution s'est poursuivie jusqu'à la fin de la période d'observation. Au bout de 9 mois d'essai, on a relevé dans le témoin des pertes de MS de 37,2 %.
Dans les greniers à mais où l'on avait fait intervenir le prédateur, on a également constaté une augmentation de pertes, inférieure toutefois à celle de la variante de référence, et qui s'est amenuisée au fur et à mesure que la période d'essai s'avançait. Au bout de 9 mois d'essai, on a relevé des pertes de 19,9 % après intervention de T. nigrescens, ce qui représente 46,5 % de moins que dans les greniers à mais où le prédateur était absent.
Influence de T. nigrescens sur la structure des dommages
On s'est livré là encore dans le cadre de cet essai à une analyse de la structure des dommages. Cette structure peut servir d'orientation pour déterminer les pertes de mais consommable subies par les paysans à la suite d'une infestation d'insectes (voir chap. 2.6). La répartition en catégories a été effectuée en fonction du barème indiqué au chapitre 2.1.2. Les épis présentant plus de 75 % de grains endommagés ont été classés dans la catégorie de dommages 5.
Dans les greniers à mais où le prédateur était absent, la part d'épis de la catégorie 5, qui était de 7 % en début d'essai, a connu une augmentation permanente pendant toute la durée de l'essai (tabl. 18). Au bout de 9 mois d'essai, 56 % des épis étaient à ranger dans la catégorie 5. En partant de l'hypothèse que les épis de la catégorie 5 ne sont plus livrés à la consommation, cela signifie une perte de maïs consommable de 56 %.
Dans les greniers où T. nigrescens avait été mis en oeuvre, le nombre d'épis de la catégorie 5 a connu au cours des premiers mois de stockage une évolution parallèle à celle de la variante témoin (tabl. 19). Il s'agit là d'un phénomène déjà observé pour les autres paramètres de pertes. On a assisté à partir du cinquième mois à des différences entre les deux variantes, le nombre des épis de la catégorie 5 ayant augmenté beaucoup plus lentement en présence du prédateur au cours de la période qui a suivi.
Il est frappant de constater la forte augmentation du pourcentage d'épis de la catégorie 5 du cinquième au sixième mois suivant le début de l'essai. Ce bond en avant se reflète également dans l'évolution des dommages, de même que dans celle des pertes et de la production de farine de forage (voir plus haut). S'il n'y a pas eu de développement parallèle des populations de P. truncatus, celle de S. zeamais a connu en revanche une forte croissance au cours de cette période. Il est par conséquent possible que ce soit ce ravageur qui est à l'origine des dommages (cf. chapitre 4.1.2). A l'issue de la période d'essai de 9 mois, 31 % des épis étaient à classer dans la catégorie 5 après mise en oeuvre du prédateur. Les pertes de mais consommables étaient ainsi inférieures de 44 % à la variante sans prédateur.
Tabl. 18: Structure des dommages causés aux épis sans intervention du prédateur Teretriosoma nigrescens (pourcentage d'épis endommagés sur un total de 300, à chaque date considérée et dans les diverses catégories de dommages)
Catégorie
de dommages |
Mois après l'introduction du prédateur |
|||||||||
0 | 1 | 2 | 3 | 4 | 5 | 6 | 7 | 8 | 9 | |
1 | 61 | 61 | 60 | 54 | 53 | 44 | 36 | 34 | 25 | 27 |
2 | 27 | 23 | 25 | 24 | 24 | 24 | 15 | 20 | 17 | 14 |
3 | 2 | 1 | 2 | 4 | 4 | 1 | 6 | 3 | 3 | 1 |
4 | 3 | 1 | 2 | 0 | 1 | 3 | 3 | 1 | 2 | 2 |
5 | 7 | 14 | 11 | 18 | 18 | 28 | 40 | 43 | 53 | 56 |
Tabl. 19: Structure des dommages causés aux épis avec intervention du prédateur Teretriosoma nigrescens (pourcentage d'épis endommagés sur un total de 300, à chaque date considérée et dans les diverses catégories de dommages)
Catégorie
de dommages |
Mois après l'introduction du prédateur |
|||||||||
0 | 1 | 2 | 3 | 4 | 5 | 6 | 7 | 8 | 9 | |
1 | 50 | 56 | 56 | 54 | 50 | 53 | 46 | 43 | 39 | 39 |
2 | 35 | 29 | 25 | 25 | 30 | 26 | 23 | 27 | 28 | 27 |
3 | 3 | 2 | 3 | 3 | 3 | 1 | 2 | 3 | 3 | 1 |
4 | 4 | 4 | 2 | 2 | 0 | 1 | 3 | 1 | 2 | 2 |
5 | 8 | 9 | 14 | 17 | 19 | 18 | 28 | 28 | 27 | 31 |
4.2 Comparaison de l'efficacité de Teretriosoma nigrescens au Togo et au Costa Rica
A la suite d'une comparaison entre des P. truncatus d'origine diverse, NISSEN (1989) a constaté de grandes différences au niveau de la condition physique des populations. Dans le contexte d'une lutte biologique, la condition physique de la population de ravageurs serait susceptible d'exercer une nette influence sur l'efficacité de la mise en oeuvre de l'insecte utile. L'essai décrit ici visait à fournir une première orientation en ce qui concerne l'efficacité probable du prédateur au Togo par rapport à la région d'origine commune au ravageur et à l'insecte utile. On a repris à cet effet les conditions d'essai exposées dans les travaux de BÖYE (1988), qui ont été réalisés au Costa Rica. La quasi-identité des conditions d'essai permet une comparaison directe des résultats.
Matériels et Méthodes
20 P. truncatus adultes ont été installés sur 200 g de maïs en vrac, d'une espèce locale à grains blancs. Au bout de 7 jours, on a rajouté les T. nigrescens dans une proportion (P.t. contre T.n.) de "2 contre 1" et de "3,3 contre 1". Les essais ont duré respectivement 50, 70 et 110 jours. Ils ont été effectués au moyen de récipients en verre de 1 I placés dans l'entrée de la cage de toile métallique, dans laquelle régnaient une température de 19 à 38 °C et une humidité relative variant de 25 à 99 %. L'interprétation est intervenue sur la base de la méthode indiquée au chapitre 2.1.2.
Résultats
La croissance démographique du ravageur a été fortement réduite par la mise en oeuvre du prédateur, et cela indépendamment du rapport numérique initial des individus (tabl. 20). Au cours de cet essai, le rapport était déjà tellement étroit dans la variante "20 contre 6" que l'on en est arrivé à une réduction maximale du nombre des ravageurs. La différence entre le témoin et les variantes impliquant le prédateur est allée en augmentant au fur et à mesure que la période d'essai s'avançait, ce qui est de toute évidence dû à l'aptitude du prédateur à endiguer très efficacement l'évolution démographique de P. truncatus.
Malgré l'étroitesse du rapport numérique entre les individus, T. nigrescens a été en mesure de se reproduire de manière très satisfaisante (tabl. 20). La multiplication du prédateur était même légèrement meilleure dans la variante "20 contre 10". Au cours de l'essai, on a assisté dans les deux variantes à une réduction supplémentaire du rapport numérique proie-prédateur, qui est descendu jusqu'à 1,3 contre 1, bien que la valeur initiale ait fortement divergé par rapport à celle rencontrée dans les conditions naturelles, qui se situe aux alentours de 7,5 contre 1 (BÖYE, 1988).
Tabl. 20: Evolution démographique de Prostephanus truncatus (P.t.) et de Teretriosoma nigrescens (T.n.) sur des grains de mais en fonction du rapport numérique initial des individus
P.t.:T.n. | P.
truncatus adultes après...jours |
T.
nigrescens adultes après ... jours |
||||
50 | 70 | 110 | 50 | 70 | 110 | |
Témoin | 290 a | 710 a | 888 a | - | - | - |
20:10 | 26 b | 37 b | 48 b | 12 | 23 | 29 |
20:6 | 22 b | 38 b | 35 b | 8 | 16 | 26 |
En fonction de l'évolution démographique du ravageur, les paramètres de pertes accusaient également une baisse très nette suite à la mise en oeuvre du prédateur (cf. tabl. 21). Dans le témoin, les dommages avaient déjà atteint 55,7 % au bout de 50 jours, c'est-à-dire plus du double du chiffre enregistré dans les variantes de référence. Les dommages constatés aux deux dates ultérieures étaient eux aussi significativement réduits à la suite de la mise en oeuvre du prédateur.
Tabl. 21: Dommages et pertes causés par Prostephanus truncatus (P.t,) sur des grains de mais en fonction du rapport numérique initial des individus et compte tenu de la mise en oeuvre de Teretriosoma nigrescens (T.n.)
P.t.:T.n. | Dommages
(en %) après ... jours |
Pertes
(en %) après ... jours |
||||
50 | 70 | 110 | 50 | 70 | 110 | |
Témoin | 55,7 a | 83,9 a | 88,5 a | 14,7 a | 44,8 a | 63,3 a |
20:10 | 27,1 b | 47,4 b | 50,7 b | 4,9 b | 11,1 b | 17,2 b |
20:6 | 22,1 b | 48,8 b | 52,1 b | 4,4 b | 10,2 b | 15,2 b |
Au für et à mesure que l'essai se prolongeait, les pertes constatées dans le témoin présentaient une forte augmentation, atteignant 63,3 % au bout de 110 jours. Si la progression s'est déroulée de façon analogue dans les variantes impliquant le prédateur, les pertes sont cependant demeurées à un niveau largement inférieur. Au bout de 110 jours, les pertes enregistrées dans ces variantes, qui avoisinaient 15 et 17 %, étaient respectivement inférieures de 76 et 73 % par rapport au témoin.
P. truncatus s'est avéré au cours de cet essai un antagoniste très efficace contre P. truncatus. En comparaison des résultats des essais effectués au Costa Rica, on n'a pas constaté de différence majeure du point de vue de l'efficacité. Pour un rapport proie-prédateur de 2 contre l, le prédateur était en mesure de réduire plus fortement la population du grand capucin du mais au Togo qu'au Costa Rica, alors que c'était l'inverse pour un rapport de 3,3 contre 1. On notera avec intérêt l'évolution démographique plus favorable de P. truncatus dans les témoins de l'essai décrit ici, ce qui pourrait être l'indice de conditions environnementales également plus favorables et/ou d'une meilleure condition physique des coléoptères (cf. NISSEN, 1989).